Jean Messagier, lumière et transparence
Le peintre français Jean Messagier fréquente en 1942 l'École des arts décoratifs de Paris où il travaille avec Brianchon et Oudot, mais son véritable apprentissage se fait dans la nature, avec laquelle il maintient un contact constant dans sa retraite de Colombier-Fontaine, près de Montbéliard, sa ville natale où il meurt en 1999. Après un voyage qu'il fait en Italie et en Algérie (1946-1948), son style s'affirme tout d'abord dans de grandes toiles brossées à larges coups, sans sujet, sans objet, faites de la seule lumière et de la transparence d'un impressionnisme démesuré mais solidement charpenté. Le point de départ de ces œuvres est le paysage, mais tellement transgressé par l'impression lumineuse, par les souvenirs accumulés que les conventions de représentation et de perspective en sont totalement absentes (Plaine battante, 1956). Messagier, exposant du Salon de mai, pratique avec bonheur la gravure comme la sculpture. Il fait partie de la nouvelle école de Paris qui comprend un certain nombre de peintres « abstraits lyriques » comme Raoul Ubac ou James Guitet, mais le qualificatif de paysagiste abstrait, bien qu'aucun élément naturel ne se reconnaisse dans ses œuvres, convient mieux à Messagier : l'expression prime la forme. Depuis 1958, le « geste » qui définit la structure de la toile se fait plus ample, plus rond, et crée de larges rythmes colorés, des tourbillons, des entrelacs transparents qui sont l'expression fougueuse d'une observation intime de la nature. Les titres (L'Entrevue de juillet, 1962 ; Sacre d'hiver, 1965 ; Opéra d'inondation, 1968 ; Journée écrasée, 1977) rappellent cette évocation naturaliste où se succèdent les variations des saisons, les présences d'animaux, les bruissements des arbres, le silence de la neige, le scintillement des rivières, tout le paysage d'une province (La Conquête de la Franche-Comté par le mois de juin) dont Messagier cherche à partager aussi la réalité sociale. C'est à la même inspiration qu'il recourt pour ses bronzes. Le château-musée de Montbéliard, qui possède un fonds régulièrement augmenté d'œuvres de Messagier, le présente de façon permanente.
Michel FRIZOT, « MESSAGIER JEAN - (1920-1999) », Encyclopædia Universalis