Le Code Orsay: une expérience du web 3

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Une rencontre entre l’art digital et l’art traditionnel du musée d’Orsay, intitulé « le code Orsay »

Tout a commencé il y a quelques jours. Je parcours alors l’actualité du Musée d’Orsay. Virginie Donzeaud, co-commissaire de l’exposition, rapporte alors les démarches faites auprès d’Agoria,figure majeure de la scène électronique internationale et reconnu pour sa capacité à créer des compositions complexes et novatrices.

Elle raconte donc cette rencontre entre deux mondes, qui a donné naissance à une mise en scène au musée d’Orsay « le code Orsay », un contrepoint entre l’art digital et l’art « traditionnel » que j’intitule ainsi de manière générique pour comprendre le principe.

L’idée semble aller dans le sens du progrès, dans un sens de réflexion sur les œuvres d’art passées, dans ce lieu qui retrace la naissance de l’art moderne.

Christophe Leribault, commissaire et Président de l’Établissement public des musées d'Orsay et de l'Orangerie appuie cette idée, je le cite :

 « En réinterrogeant nos collections à travers des savoirs et des outils contemporains, les créations d'Agoria insufflent à nos œuvres une vie nouvelle et décillent nos habitudes de regard".

La présentation réalisée dans une vidéo ce cet évènement est  tout à fait convaincante.

Je me rends donc vendredi matin au musée d’Orsay.

Malheureusement, grande déception :  l’alchimie ne se fait pas et je vais vous expliquer pourquoi.

L’expérience se vit en deux parties :  une interprétation de l’Atelier  de Courbet d’une part et d’autre part, la réalisation d’une sculpture en collaboration avec Johan Lescure pour une sculpture novatrice qui invite les visiteurs à participer activement à la création artistique,

La première se situe en salle 7 à gauche à l’entrée du musée.

Accrochez-vous bien : il s’agit de l’interprétation par Saccaromyces cervisiae de l’Atelier du peintre de Gustave Courbet .

Encore une fois, l’idée est intéressante : il s’agit d’une création qui questionne sur le sujet de la mémoire et de la transmission, au travers de la retranscription d’une expérience biologique d’une culture d’une levure.

Un laboratoire, somme toute, dans lequel cette levure reproduirait les évènements qui se sont déroulés dans la vie du peintre.

Toutes ces données sont injectées dans la reproduction digitale du tableau, en donnant vie au tableau : « un pont entre le tangible et l’intangible, le vivant et le digital » pour citer l’artiste Agoria.

L’idée me séduisait vraiment, d’autant que j’interviens en tant que conseiller artistique pour ce type d’évènement entre le digital et l’art. Ce lien est au cœur de la démarche de l’artiste qui veut montrer que l’univers du codé et du digital sont indissociables du physique et du vivant.

Mais le résultat n’est pas là.

Vous arrivez dans la salle où est exposé l’Atelier du Peintre de Courbet et l et un enterrement à Ornans.

Devant l’Atelier du peintre, un écran et un bref explicatif pour vous guider dans l’expérience.

La salle semble déshumanisée.

Sincèrement vous n’avez pas envie d’y rester !

D’ailleurs, elle était vide.

Seul un groupe d’américains était présent à l’écoute d’un guide qui se débattait pour tenter d’expliquer les tenants et aboutissants de l’expérience. Mais sincèrement, le public américain ne semblait pas bien comprendre les choses.

Alors souvent lorsque l’on parle de digital et d’art, tout le monde trouve ça « stylé » pour reprendre une expression à la mode.

Mais là c’est raté et cela n’a rien à voir,  je le précise,  avec l’artiste Agoria et à l’initiative de ce projet, mais plutôt à la scénographie absente, et c’est bien dommage !

Bref, c’est raté !

Heureusement, vous êtes face à l'un des chefs-d'œuvre les plus marquants de l'histoire de la peinture. L'Atelier du peintre, réalisé par Courbet, se distingue tant par son ampleur que par son sujet. Initialement conçu pour l'Exposition universelle de 1855 à Paris, ce tableau a été refusé par le jury. En réaction, Courbet a décidé de le présenter lors d'une exposition personnelle payante, dans un édifice qu'il a financé lui-même. À cette occasion, il a publié un catalogue accompagné d'un texte intitulé "Le Réalisme", où il proclame avoir "créé de l'art vivant".

L'Atelier se présente comme un gigantesque autoportrait, dépeignant l'artiste en train de peindre un paysage franc-comtois dans son atelier parisien. Il est entouré de ses amis, dont les portraits sont visibles à droite de la composition. Les figures à gauche représentent, quant à elles, la diversité sociale, symbolisant la misère, la pauvreté, la richesse, ainsi que les exploités et les exploiteurs. Malgré sa réalisation rapide, la toile témoigne de la virtuosité de Courbet dans divers genres artistiques tels que le nu, le portrait, le paysage, la nature morte et la peinture animalière.

La seconde partie est, quant à elle, réussie :

La sculpture est belle, l’idée est là.

E Lumina ,portail et antenne, nous relie aux artistes du musée d’Orsay en établissant un dialogue dans le temps.

Mais pourquoi l’avoir confinée de l’autre côté, au bout du bout du musée dans une salle à gauche ?

Agoria, artiste de renom dans le domaine de la musique électronique, s'associe ici à l'artiste Johan Lescure pour présenter une installation artistique exceptionnelle au Musée d'Orsay. Ensemble, ils ont donné vie à {Σ LUMINA}, une sculpture novatrice qui invite les visiteurs à participer activement à la création artistique.

Cette sculpture offre une expérience unique, où le visiteur devient en partie l'auteur d'œuvres digitales grâce à son souffle. L'ombre projetée par la sculpture forme un QR code au sol, ouvrant ainsi la porte vers des œuvres numériques. Ces créations évoluent en fonction du souffle de chaque visiteur, rendant chaque interaction unique.

Les œuvres numériques sont élaborées à partir d'une sélection de chefs-d'œuvre issues des collections du musée, soigneusement choisies par Agoria et Johan Lescure. De manière concrète, la lumière projetée sur la sculpture génère périodiquement un QR code au sol. Après le scan, le visiteur peut activer l'œuvre digitale en soufflant sur le microphone de son téléphone, transformant ainsi l'œuvre de manière unique et personnelle.

Chaque visiteur a la possibilité d'emporter et de conserver le souvenir de son expérience en matérialisant l'œuvre sous forme de NFT (jeton non fongible) via le procédé Web3 appelé "live minting". Ces œuvres digitales existent sur la blockchain Tezos, en collaboration une plateforme ouverte dédiée à l'art génératif, et l'application Feral File en "open source". Cette dernière offre des moyens dynamiques d'expérimenter, de collectionner et de plonger dans l'univers captivant de l'art digital.

Cette expérience artistique, à la fois poétique et ludique, représente également une avancée technologique significative. Agoria et Johan Lescure prévoient de créer entre quatre et sept œuvres originales inspirées par celles générées par les visiteurs. Ces œuvres feront l'objet d'une vente, dont une partie des bénéfices sera reversée au musée, contribuant ainsi au soutien continu de cette institution culturelle.

Mon avis sur cet évènement

Tout d’abord pour ne pas paraître absolument négative, l’exercice du contrepoint est toujours très intéressant, une manière de rechercher des liens que l’on ne verrait pas forcément : La fondation louis Vuitton s’y était essayée avec le face à face entre Joan Mitchell et Claude Monet, ou encore le musée de l’Orangerie  entre Mickalene Thomas et Monet, ou encore le musée Matisse de Nice entre Henri Matisse et David Hockney

Faire voir ce que l’on ne voit pas forcément est un concept qui colle parfaitement à ce projet, entre le monde du web 3 et l’art.

Mais, de mon point de vue personnel, la scénographie est ratée!

Vous l’aurez compris l’expérience fait à l’Atelier de Courbet ne m’a pas convaincue.

La monumentalité et la force de ce tableau aurait mérité pour une confrontation ou plutôt une expérimentation face au numérique, un environnement plus théâtral comme sait le faire musée du Petit Palais.

Sincèrement, je ne me suis pas du tout retrouver participer à cette expérience, c’est un flop .

Quant à l’installation de la sculpture, j’ai été tout à fait convaincue, mais surtout par l’œuvre elle-même.

Elle semble être vivante et rentre bien en résonnance des œuvres du musée.

Mais pourquoi dans ce cas ne pas l’avoir placée au centre du musée ?

Cela aurait donné plus de sens à l’expérience, une sculpture expérimentale, qui aurait pu capter l’essence des œuvres du musée d’Orsay.

Agoria a certes créé un morceau musical en hommage au musée d’Orsay, qui a été diffusé au musée, en avant-première, dès le 13 février, puis le 23 février lors du DJ Set de l’artiste dans la nef du musée. Belle initiative d’happening, mais tout cela est éphémère et la scénographie des deux œuvres visibles jusqu’au 10 mars demeurent réellement peu convaincante.

Elodie Couturier

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