Art vietnamien, Le Pho, Mai Thu et Vu Cao Dam

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Rencontre avec trois pionniers de l’art moderne vietnamien

Je vous emmène aujourd’hui à la rencontre de trois pionniers de l’art moderne vietnamien : Le Pho, Mai Thu et Vu Cao Dam, dans une exposition qui se tient au musée Cernushi à Paris.

Cette exposition coïncide avec le centenaire de l’École des beaux-arts de Hanoï, laquelle a permis pour la première fois la rencontre de l’art occidental et des traditions vietnamiennes.

1. Contexte historique

Resituons tout d’abord le contexte : à la fin du XIXème siècle, la France assoit sa domination sur l’Indochine, entraînant des bouleversements tant politiques, économiques que culturels. C’est dans ce cadre que naît l’art moderne vietnamien. Une date clé : en 1925, l'École des Beaux-Arts de l'Indochine ouvre à Hanoï sous la direction de Victor Tardieu.

L'institution, également appelée École d'Hanoï, avait pour objectif de promouvoir les arts et de former de jeunes artistes locaux, tout en introduisant des techniques et concepts occidentaux dans un contexte asiatique. Les influences françaises y sont donc très présentes, notamment en ce qui concerne la peinture académique, mais les élèves ont rapidement intégré les traditions et les sensibilités locales à leur pratique artistique.

Cette école a permis de former une nouvelle génération d’artistes vietnamiens qui ont fusionné les techniques classiques françaises, comme la peinture à l’huile et le dessin académique, avec des techniques vietnamiennes telles que l’encre sur soie et la laque. Cette rencontre entre deux mondes artistiques a donné naissance à un mouvement unique et influent, parfois qualifié de Renaissance artistique vietnamienne.

Nos trois compères, Le Pho, Mai Thu et Vu Cao Dam, diplômés des deux premières promotions, se sont placés en tant qu’artistes pionniers qui mèneront leur carrière en France. Ils ont bénéficié du soutien officiel du gouvernement colonial qui exposait leurs œuvres au Vietnam et en Europe. Cependant, la Seconde Guerre mondiale puis la guerre d’Indochine mettront fin à ce système et les trois artistes se tourneront vers des galeries privées.

Chacun trouvera alors sa voie d’expression, proposant une synthèse entre l’Europe et le Vietnam, comme l’a su faire également l’artiste chinois Zao Wou Ki dans un autre contexte.

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2. Les caractéristiques artistiques de l'École de Hanoï

L'École des Beaux-Arts de l'Indochine a contribué à la création d'un style artistique original où les artistes vietnamiens exprimaient des sujets et des scènes locales tout en adoptant des techniques occidentales.

a. Fusion des techniques occidentales et locales

Les artistes formés à l'École de Hanoï ont adopté des techniques européennes telles que la peinture à l’huile, l’aquarelle et la sculpture sur bois ou pierre. Cependant, ils ont aussi revitalisé les traditions locales comme la peinture à l'encre sur soie, la peinture sur laque, et l'utilisation de couleurs naturelles. La fusion de ces pratiques a permis de créer un style unique, mêlant modernité et tradition vietnamienne.

b. Thèmes vietnamiens

Les sujets représentés par les artistes de l’École de Hanoï sont souvent profondément ancrés dans la culture vietnamienne, avec une attention particulière portée aux scènes rurales, à la vie quotidienne et à la nature. Les paysages vietnamiens, les portraits de femmes en costumes traditionnels, les scènes de village ou de la vie paysanne, ainsi que des motifs bouddhistes ou taoïstes, étaient des thèmes récurrents.

Les œuvres expriment une atmosphère sereine, souvent teintée de nostalgie, capturant la beauté du Vietnam traditionnel en pleine transformation.

c. Peinture sur soie et peinture laquée

La peinture sur soie est l’une des techniques les plus importantes développées par les artistes de l’École de Hanoï. En adaptant les techniques occidentales du dessin et de la composition, ils ont réinventé cet art traditionnel, produisant des œuvres d'une grande délicatesse. L'encre sur soie permettait de donner une grande douceur aux portraits et paysages.

La peinture sur laque est une autre innovation majeure des artistes de l’École de Hanoï. Traditionnellement utilisée pour des objets décoratifs et religieux, la laque a été adaptée par ces artistes pour devenir un médium artistique à part entière. Les couches successives de couleurs et les reflets brillants de la laque permettent de créer des œuvres d’une grande profondeur et d’une beauté unique.

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3. Exposition des œuvres

L’exposition met en lumière trois artistes majeurs :

  • Mai Thu : Il vous embarque dans un univers de douceur avec des scènes de portraits féminins, de la vie quotidienne et des paysages vietnamiens et européens. Son style est raffiné et poétique.
  • Lê Phổ : Prolifique et renommé, il fusionne les techniques occidentales et les traditions vietnamiennes, créant des œuvres vibrantes souvent centrées sur des portraits de femmes élégantes, des scènes florales et des paysages luxuriants.
  • Vũ Cao Đàm : Formé en sculpture, il s'est ensuite consacré à la peinture, alliant une esthétique vietnamienne à des techniques occidentales. Ses sculptures en bronze et ses tableaux révèlent une élégance simple et harmonieuse.

Ne manquez sous aucun prétexte cette exposition qui se tient du 11 octobre au 9 mars 2025, rassemblant 150 œuvres retraçant les trajectoires de ces artistes, depuis leur formation à l’École des Beaux-Arts de Hanoï jusqu’à la fin de leur longue carrière menée en France à partir de 1937.

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