Arman, mémoires
Arman, mémoires accumulées
Arman – J’ai eu de la chance dans la vie. Très jeune, je m’étais forgé un univers. Peintres et poètes étaient comme les chevaliers de la Table ronde. Le roi Arthur, c’était Marcel Duchamp. J’ai rencontré le roi Arthur et les principaux chevaliers : Man ray, Max Ernst, Dali… André Breton, qui avait vu un de mes violons carbonisés chez un marchand d’art primitif, m’a dit : « J’aime beaucoup votre violon brûlé : c’est comme ça que j’apprécie la musique. »
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Otto Hahn – Pensez-vous avoir subi l’influence du groupe Gutaï ?
Arman – Mon chemin est différent. Avec mes « cachets », je me servais d’un objet pour inscrire une trace. C’est une des pistes de mon avancée vers l’objet. L’autre vient de la musique. Eliane, ma première épouse, travaillait avec le GRP, le groupe de recherche musicale. L’appellation « allure objet » vient du vocabulaire employé par le GRP. Sous la direction de Pierre Schaeffer, inventeur de la musique concrète, des étudiants enregistraient des sons. Ils prenaient par exemple un abat-jour en opaline et le faisaient tinter. Ils enregistraient la tonalité et transformaient la vitesse des vibrations. Ils nommaient cette musique des « allures d’objets ». J’ai kidnappé ce mot pour m’en servir. La distorsion de l’impression sonore allait de pair avec la distorsion de l’impression picturale. Quand je déroulais mes objets trempés dans l’encre, j’imprimais leur allure. J’ai utilisé des œufs, une chaussure, des roulements à bille, des bouteilles, des ressorts… Je prenais tout ce qui pouvait laisser une trace un peu intéressante.
Otto Hahn – Y avait-il une composante de violence comme dans le groupe Gutaï ?
Arman – Les Japonais piétinaient le support, dérapaient dessus à vélo. Il y en a même un qui a sauté du quatrième étage et s’est écrasé sur la toile. Cela touchait à l’hystérie. Ma composante de violence était d’avantage dans la lignée de Van Gogh. Mais la différence entre les peintres du groupe Gutaï et moi, c’est qu’ils en sont restés à la peinture. Moi le geste m’a conduit vers l’objet : ayant brisé une soucoupe sur la toile, j’en ai gardé les morceaux et les ai collés dans l’œuvre. Je suis alors entré dans la logique de l’objet. J’en utilisais de toutes sortes et j’avais des tiroirs pleins de rouages et de lampes de radio. Un jour, en 1959, j’ai considéré qu’un tiroir plein de lampes était une œuvre complète. J’ai fixé un Rhodoïd dessus, j’ai peint les côtés en noir et je l’ai montré tel quel. C’était ma première accumulation.
Otto Hahn – Quand faites vous votre première « poubelle » ?
Arman – En 1959, tout arrive en même temps. Je suis comme un canon bourré de poudre qui ne demande qu’à partir. Mon langage s’organise, les différentes facettes s’articulent. Mais, malgré mes efforts, je ne réussis pas à exposer. Personne ne veut prendre le risque de montrer mes « poubelles ».
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